Bonjour à toutes et tous. Tout d’abord, je souhaite remercier les organisateurs de Blend pour l’accueil et pour me donner la possibilité de parler de l’accessibilité numérique pour les personnes handicapées lors de cette conférence.
Pour votre information, le support de mon intervention et une transcription textuelle sont disponibles pour vous permettre de la suivre plus facilement si besoin. Vous les trouverez à l’adresse : a42.fr/blend2018.
Je me présente rapidement. Je m’appelle Sylvie et je suis aveugle de naissance, donc directement concernée par le numérique et son accessibilité.
Cela fait 20 ans ce mois-ci que je travaille dans le domaine de l’accessibilité numérique et encore plus longtemps que l’ordinateur m’aide au quotidien dans mes loisirs et mes activités professionnelles et associatives.
Après avoir exercé au sein de l’association BrailleNet, je suis depuis 4 ans associée de la société Access42, où je sensibilise et forme à l’accessibilité numérique.
En dehors de mon travail, je suis membre de nombreuses associations : associations de parents d’élèves collège/lycée et l’association nationale des maîtres de chiens guides, ANMCGA.
Access42
Pour présenter brièvement Access42, il s’agit d’une coopérative (SCOP) et d’une entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS), spécialisée en accessibilité numérique.
Nous proposons du conseil, de l'accompagnement, des audits et des formations. Vous trouverez tous les détails sur le site d’Access42 où nous mettons également à disposition des ressources pour l’accessibilité et des outils que nous avons développés.
Access42, c'est aujourd’hui 9 personnes (et une chienne-guide !). J'en profite pour remercier mes collègues pour leurs conseils et leur soutien lors de la préparation de cette conférence.
Au programme
Cette conférence se divise en trois temps :
- Je ferai tout d’abord le point sur les personnes handicapées et le numérique : comment elles y accèdent, quelle est la législation, quels sont les besoins et les freins et pourquoi faire accessible.
- Je montrerai ensuite des exemples pour illustrer les problèmes que l’on peut rencontrer et les bonnes pratiques.
- Enfin, je vous proposerai quelques pistes pour vous permettre de contribuer à améliorer l’accessibilité numérique pour les personnes handicapées, premières concernées par cette thématique.
Les fondamentaux : handicap, accessibilité et législation.
Une définition du handicap fondatrice
On peut lire toutes sortes de choses lorsqu'on cherche une définition pour « personnes handicapées ». C'est pourquoi je souhaite reposer les bases en vous rappelant la définition internationale du handicap, la seule qui fasse autorité.
« Par personnes handicapées, on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. »
Article premier, Convention relative aux droits des personnes handicapées (2006)
C'est au fondement de toute la réflexion moderne sur le handicap et l'accessibilité. Le problème, ce n'est pas le handicap, mais l'inaccessibilité de la société qui empêche les personnes handicapées d’exercer pleinement leurs droits.
L'accessibilité, un droit humain fondamental
Ainsi l’accessibilité, dans le contexte qui nous intéresse, très simplement, c’est permettre aux personnes handicapées de jouir pleinement de leurs droits et de leurs libertés fondamentales en levant les barrières qu'elles peuvent rencontrer.
L’accessibilité numérique s’inscrit dans cette démarche d’égalité et constitue un enjeu politique et social essentiel afin de garantir à tous, sans discrimination, le même accès à l’information et aux services en ligne.
Législation en France
En France, ce droit est consacré par la loi de 2005 « sur l’égalité des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ». C'est une loi très importante. Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet, mais ce n'est pas l'objet de cette conférence.
Je résume brièvement ici les grandes lignes en ce qui concerne l'accessibilité numérique avec les mises à jour de 2016 et de 2018.
L’article 47 oblige initialement uniquement l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics à rendre leurs sites accessibles (internet, intranet et extranet) aux personnes handicapées.
Cette obligation d’accessibilité a été récemment étendue en 2016 aux services délégataires d’une mission de service public (une société gestionnaire de transports ou une agence de l'eau par exemple) et aux sociétés privées dont le chiffre d’affaires dépasse un seuil qui doit encore être défini par décret. Toutes les sociétés privées du CAC 40 seront très certainement concernées.
De nouvelles obligations ont également été introduites par la mise à jour de 2016 :
- Les acteurs concernés devront désormais afficher le niveau d’accessibilité sous peine de sanction pouvant aller jusqu'à 25 000€.
- Si le site n'est pas accessible, ils devront s'engager à publier des plans de mise en accessibilité sur 3 ans maximum.
- Ils devront également permettre à l'utilisateur de signaler ses difficultés et y répondre dans un délai raisonnable.
Les personnes handicapées et le numérique
Utilisation du numérique en France
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je vous invite à réfléchir sur votre utilisation du numérique et sur la place qu'il prend dans votre vie.
Voici quelques chiffres sur l’utilisation du numérique en France, tirés d’un baromètre réalisé par le Credoc en juin 2017 auprès de 2209 personnes.
Selon cette enquête :
- 67% des personnes consultées utilisent l’administration en ligne (ou e-administration).
- 61% indiquent qu’ils ont fait un achat en ligne au cours des 12 derniers mois.
- 59% des Français sont inscrits sur des réseaux sociaux.
Le numérique est devenu indispensable au quotidien pour la grande majorité d’entre nous. Indispensable, il l'est peut-être même encore plus pour les personnes handicapées.
Une diversité de handicaps
Derrière le terme de personnes handicapées, il existe une diversité de handicaps : physiques, sensoriels, mentaux (intellectuels, cognitifs, psychiques, etc.), polyhandicap, troubles de santé invalidants.
Certains handicaps sont visibles. D’autres handicaps, et ce sont les plus nombreux, ne se voient pas.
- Les personnes très malvoyantes. Vous pouvez avoir l’impression qu’elles voient bien, car elles se déplacent en apparence sans problème, mais elles ne peuvent pas lire les panneaux dans le métro ou le texte affiché sur le papier que vous leur faites passer.
- Les personnes sourdes ou malentendantes n’affichent pas sur leur visage qu’elles ne vous entendent pas.
- Les personnes ayant un handicap intellectuel, des troubles cognitifs (dys, déficit de l’attention, difficultés de concentration) ou un handicap psychique.
- Les personnes qui ont des troubles de santé invalidants : cancer, douleurs chroniques, allergies. Ces troubles peuvent empêcher ces personnes de réaliser certaines actions pendant un temps ou de façon durable.
Un autre facteur à considérer et que l’on oublie souvent concernant les personnes handicapées : chacun a sa propre histoire, ses propres habitudes et usages, son propre ressenti.
Nous sommes toutes et tous différents !
Handicap en France
Combien sommes-nous en France ? Les gens pensent souvent que le nombre de personnes handicapées est négligeable. Pas du tout !
En France, le nombre de personnes concernées représente 12 millions de personnes, soit 1 personne sur 5. À noter que cette proportion est similaire dans le monde entier. Un chiffre négligé, mais loin d’être négligeable !
C'est sans compter le nombre grandissant de personnes âgées dont les facultés visuelles, auditives, motrices et intellectuelles diminuent avec l’âge. On arrive alors à 20 millions de personnes potentiellement concernées.
À ceux qui pensent que les personnes handicapées n'utilisent pas le numérique, nous sommes plus nombreux que vous ne le croyez 😉.
Une pluralité d’outils
Les personnes handicapées sont en mesure d’utiliser le numérique comme tout le monde
.« Mais comment faites-vous ? »
est une question récurrente. Nous faisons comme vous ou presque !
Quand j’évoque mon utilisation du téléphone ou de l’ordinateur, beaucoup de gens sont surpris qu’une personne aveugle puisse se servir d’un ordinateur !
C’est possible grâce à une multitude de technologies d’assistance.
J’affiche ici toute une série de technologies d’assistance qui permettent de compenser le handicap.
En ce qui me concerne, j’utilise un logiciel appelé « lecteur d’écran », qui va analyser l’information affichée sur l’écran et la restituer en texte. Ce texte peut ensuite être lu par une synthèse vocale (vous l’entendez souvent dans les bus ou les ascenseurs) et/ou à l’aide d’une plage braille, dont vous voyez une photo sur l’écran (en haut à gauche).
Pour les personnes ayant un reste visuel, il existe, dans les systèmes d’exploitation, des options pour personnaliser l’affichage : changement de zoom, grossissement des, caractères, modification des contrastes, de la police…
Pour les personnes ayant des difficultés motrices, il existe de nombreuses technologies, parfois très sophistiquées, parfois « bricolées » par un ergothérapeute. On voit ici, un clavier utilisable d’une seule main. Des systèmes permettant de piloter l’ordinateur à l’aide du regard, des mouvements de la tête ou de la pensée. D’autres utilisent des contacteurs à souffle. Pour écrire, toutes ces personnes peuvent ainsi pointer sur des claviers visuels, comme vous avez sur vos appareils mobiles.
Ces technologies sont variées. Il faut apprendre à les utiliser. Certaines sont libres ou ne coûtent que quelques euros. D’autres sont extrêmement chères. Tout comme les personnes, la façon d’utiliser ces aides techniques est différente selon la personne qui est derrière.
Le numérique : une promesse d’émancipation et d’autonomie
Grâce au numérique, de nouveaux horizons se sont ouverts à nous. Ça nous a permis de nous affranchir de nombreux obstacles qui existent dans le monde physique et d’accomplir au quotidien des tâches jusqu’alors impossibles sans dépendre de l'aide d’une tierce personne.
Lire un document ou remplir un formulaire, action jusque là évidemment impossible pour les personnes aveugles ou très compliquée pour les personnes ayant des difficultés à lire du texte à cause de la taille de l’écriture, de la police utilisée, du contraste, de l’interlignage.
En 2015, j'ai ainsi réussi à déclarer mes impôts en toute autonomie 🎉.
Se renseigner ou prendre un rendez-vous. Prise de rendez-vous en ligne, centre ou application de relais téléphonique, des alternatives au téléphone se développent. Désormais une personne sourde, si elle est équipée, peut téléphoner toute seule.
C'est un « sentiment de liberté qui est enivrant »
pour reprendre les mots de ma copine Sophie. Je vous invite à lire son témoignage : Roger Voice a changé ma vie ! 💚.
Sociabiliser, communiquer et échanger. Derrière votre ordinateur, lorsque vous échangez avec une personne handicapée, vous ne savez pas qu’elle a un handicap, les différences sont « gommées ». Ces nouveaux lieux et moyens de sociabilité ont permis à des personnes, souvent isolées, de s'exprimer, de rencontrer des gens, d’échanger sur des centres d’intérêt communs.
Ou encore faire ses achats. La liste des possibles offerts par le numérique est infinie !
Le numérique en 2018 : un rendez-vous manqué !
Malheureusement, aujourd’hui, ce potentiel incroyable n'est pas mis au service des personnes handicapées. L'immense majorité des contenus numériques est inaccessible. C’est une véritable catastrophe !
La frustration face à un contenu inaccessible est énorme. Ne pas pouvoir effectuer ou finir la tâche qu’on avait commencée parce qu'un site ou une application est inaccessible, c’est comme si on revenait des années en arrière.
Les personnes qui ne manient pas parfaitement leurs technologies d’assistance, moins aguerries face aux problèmes que l'on rencontre habituellement, vont abandonner la consultation du site ou l’action en cours ; découragées et humiliées d’être constamment oubliées.
Nous perdons notre indépendance. Nous sommes encore une fois exclues de la société.
Comme mon amie Isabelle, « j’aimerais ne plus me poser la question de l’accessibilité »
.
Les personnes handicapées et l'emploi en 2018
1 personne sur 5 est concernée, mais où en sommes-nous de la participation des personnes handicapées à la société ? Prenons le cas de l'emploi.
Le handicap est devenu le premier motif de discrimination selon le Défenseur des droits. Celles-ci s'exercent principalement dans le monde du travail.
Ainsi, selon le gouvernement, le taux de chômage des personnes handicapées est 2 fois supérieur au reste de la population (19% contre 10%).
Les personnes handicapées sont confrontées à l'inadaptation croissante des outils numériques, rarement accessibles. Cette inaccessibilité crée une situation d’insécurité professionnelle permanente.
Par exemple, la mise à jour d’un logiciel peut avoir comme conséquence un changement de poste non désiré et qui ne correspond pas aux compétences de la personne (sous-emploi), voire dans certains cas licenciement ou non renouvellement de contrat.
Une association de personnes handicapées a donc porté plainte auprès du Défenseur des droits qui a rendu une décision en février 2017. Je vous invite également à lire l'article pour mieux comprendre le contexte : Discriminations : accessibilité des logiciels utilisés par les agents publics, des administrations encore en défaut.
Dans cette décision, le Défenseur des droits demande l'application des normes internationales d’accessibilité sur l'ensemble des logiciels et applications utilisées par les agents publics handicapés.
Norme et référentiel pour produire des sites et contenus accessibles
La législation se base sur une norme internationale : Web Content Accessibility Guidelines, WCAG 2.1. Devenue une norme ISO en 2012, elle est la base sur laquelle s’appuyer pour faire des contenus accessibles.
Afin d’appliquer cette norme, nous utilisons en France le RGAA 3 (Référentiel Général d’Accessibilité pour les Administrations). Il donne, thématique par thématique, une liste de critères à respecter pour être conforme à la norme : images, liens, formulaires…
Afin de mieux comprendre ce référentiel, il existe de nombreuses ressources permettant de le prendre en main, par corps de métier (designer, chef de projet, développeur…) et type de développement (web, mobile) : ressources RGAA.
Exemples d’erreurs basiques
Beaucoup de chemin reste à faire pour que la participation des personnes handicapées à la société soit effective. Le cadre législatif est améliorable, mais il existe.
Les technologies d’assistance sont très efficaces, mais elles échouent si l'accessibilité n'est pas prise en compte. Il s'agit la plupart du temps d’erreurs basiques, en voici quelques exemples.
Textes en images
Une première difficulté que nous rencontrons sont les textes en images.
Présence oui, pertinence non !
Si l’exigence de donner à chaque image une alternative textuelle est connue aujourd’hui, on voit de plus en plus rarement des images sans alternatives, leur pertinence n’est pas toujours au rendez-vous, ce qui entraîne un manque d’accès à l’information véhiculée par l’image.
Voici ce qu’on entend quand on tente de contacter le service client d’un chauffeur VTC :
« Graphique “contactez-nous”, par mail en lien “cliquant ici”.
»
Par téléphone : visité lien.
Impacts utilisateurs
Les impacts pour les utilisateurs sont de taille.
Les utilisateurs malvoyants, dyslexiques ou présentant un trouble cognitif ont besoin d’adapter la présentation des contenus à l’écran pour faciliter leur lecture. Ils doivent agrandir la taille des, caractères, changer de typo, de couleurs de texte, etc.)
Les textes en images rendent impossibles ces adaptations de présentation
Les utilisateurs de lecteurs d’écran auront aussi des difficultés. Je rappelle que cela peut être des personnes aveugles, très malvoyantes ou ayant des difficultés de lecture. Le contenu restitué à l’utilisateur est l’alternative de l’image. Ici elle est vide, donc le lecteur d’écran indique « lien visité », car il ne peut pas ignorer un lien image.
Si l’alternative n’est pas renseignée ou l'est incorrectement, l’utilisateur n’accède jamais à cette information (ici, impossibilité de contacter le service client)
Un cas concret : je devais récemment reprogrammer la livraison d’un colis. On pouvait consulter la liste des relais colis sur une, carte Google Map. Aucune information supplémentaire n’était proposée. Je n’avais donc pas accès à la liste relais près de chez moi J’ai dû demander à mon fils de cliquer pour moi. À nouveau une dépendance de quelqu’un !
Solution
- Remplacer les images textes par du texte stylé en HTML/CSS.
- Mettre à disposition un mécanisme de remplacement des images texte par du texte stylé.
Vous voyez en capture d’écran un petit outil basé sur JavaScript (que nous développons), qui permet d’injecter le texte contenu dans l’alternative de l’image en remplacement de l’image elle-même. Ce qui permet ensuite aux personnes qui le souhaitent d’adapter l’apparence du texte.
Important : les images textes sont admises uniquement dans les cas où la police n’est pas reproductible en CSS (par exemple, un logo ou une typo fantaisiste).
Formulaires
Les formulaires sont un outil essentiel dans notre rapport avec le numérique puisqu’ils permettent de faire beaucoup de choses :
- Réserver un billet (train, avion, bus)
- Déclarer ses impôts
- Rechercher un document
Formulaire à choix multiple
Je vais maintenant vous faire quelques démonstrations à l’aide de mon lecteur d’écran.
Je me déplace dans le formulaire au clavier, en appuyant sur la touche tabulation. Vous avez peut-être entendu un bip, indiquant que mon lecteur d’écran est passé en mode saisie dans un formulaire. Il annonce juste : « Oui, bouton radio non coché. Non bouton radio non coché ».
Je ne sais pas à quoi je réponds et je dois donc désactiver le mode formulaire pour revenir en arrière et lire la question qu’on me pose. J’appuie donc sur un raccourci, vous entendez peut-être un autre bip indiquant que j’ai quitté le mode édition de formulaire.
Je remonte et j’entends la question : « Avez-vous un passeport ? ».
Le lecteur d’écran n’a pas restitué la question, car celle-ci n’est pas reliée techniquement aux champs.
Formulaire à choix multiples accessible
Voici maintenant le même formulaire rendu accessible. Vous verrez que pour vous, ça ne change rien, c’est juste une modification du code, mais pour la personne qui utilise un lecteur d’écran, ça change tout !
On entend donc : « Avez-vous un passeport, groupage ? Oui, bouton radio 1 sur 2 ».
Le lecteur d’écran annonce « groupage », car les champs sont reliés dans le code. Il décompte également le nombre de boutons radio disponibles, 1 sur 2.
Si je tabule à nouveau, j’entends « non, bouton radio non coché, 2 sur 2 ».
Et enfin, le bouton continuer avec un titre, une information complémentaire, « continuer vers l’étape suivante ».
Les champs sont réunis visuellement et techniquement, pour ceux qui connaissent, à l’aide des éléments fieldset et legend.
Champs aux étiquettes similaires
Je tabule et j’entends : « Prénom, édition avec autocomplétion ». En tabulant encore j’entends à nouveau la même chose : « Prénom, édition avec autocomplétion ».
Je dois donc refaire la même manip que tout à l’heure, pour essayer de comprendre plus exactement de quoi il s’agit.
Là, j’entends bien qu’il s’agit du passager numéro 1 puis du passager numéro 2.
Avec mon lecteur d’écran, je n’ai pas une vision globale de la page, donc je ne sais pas à qui « prénom » fait référence.
Regrouper les champs aux étiquettes similaires
Voici maintenant le même formulaire rendu accessible :
Vous entendez : « passager numéro 1, groupage, prénom édition avec autocoplétion ».
Et de même pour le passager numéro 2.
On a utilisé les mêmes éléments fieldset et legend pour regrouper les champs et rendre les choses plus claires. ces implémentations sont simles à faire, ne gênent pas le design et sont une aide précieuse pour les personnes utilisant un lecteur d’écran
Erreurs de saisies signalées uniquement par la couleur
Ce problème concerne non seulement les utilisateurs de lecteurs d’écran, mais aussi les gens qui voient mal ou pas les couleurs.
Lorsque je tabule, j’entends le prénom. À la tabulation suivante, « email astérisque, édition avec autocomplétion, sduchateau&access42.net », mais je ne suis pas informée qu’il y a une erreur.
L’impossibilité de percevoir l’erreur impacte les utilisateurs aveugles ou déficients visuels. L’information n’est pas restituée par le lecteur d’écran.
L’information véhiculée par la couleur n’est pas restituée par un lecteur d’écran et un utilisateur qui a des troubles de la perception des couleurs peut ne pas percevoir cette mise en forme.
Il est donc impossible de savoir où se situe l’erreur.
Il est enfin impossible de terminer le processus.
Erreurs de saisies signalées
Voici maintenant l’exemple réparé.
On entend : « Email astérisque. Édition, entrée invalide auto complétion. sduchateau&access42.net. (format attendu : nom@domaine.ext). Erreur dans l’adresse email, exemple d’email valide, audrey@gmail.fr. »
La solution est d’ajouter un texte adjacent au champ qui retranscrive l’information véhiculée par la couleur. Dans le cas de champs formatés, ajouter un exemple réel de saisie.
Captcha image
Les captchas sont une plaie pour les utilisateurs, cela rend la finalisation d’un formulaire souvent impossible.
Afin de récupérer les résultats du brevet, il faut résoudre un captcha en plus de donner un identifiant et un mot de passe. Voici ce que cela donne :
On entend : « Graphique : image de vérification. Lien : générer un nouveau code de contrôle. Saisir le code de contrôle : édition avec auto complétion. Bouton « valider ». Bouton « quitter ». »
Impacts utilisateurs
- Les utilisateurs aveugles n’accèdent pas au contenu du test, ne peuvent jamais remplir le code de sécurité
- Les utilisateurs avec des difficultés de décodage de l’écriture (dyslexique par exemple) : ne peuvent pas lire des, caractères qui ont subi une distorsion et donc retranscrire le captcha
- Dans notre exemple, on ne récupère jamais les résultats d’examen.
N’ayant pu accéder à ces résultats, je suis passée au collège, on m’a imprimé ces résultats. Obligation de se les faire lire retour en arrière !
Solution
- Pas de captcha.
- Proposer une solution alternative : alternative audio souvent … inaudible. Parfois l’audio est en anglais donc incompréhensible.
- Proposer un courriel de contact.
- Envoi d’un code par SMS.
Documents bureautiques
Lorsque l’on est investi dans des associations, il n’est pas rare qu’on reçoive des documents PDF inaccessibles. IL s’agit de documents image, des scans de documents signés.
Un PDF inaccessible
On entend : « Ce document semble vide. Il s’agit peut-être d’un document mal structuré ou d’une image numérisée nécessitant la reconnaissance optique des, caractères. » Ce qui n’apporte aucune information.
Impacts utilisateurs
Les utilisateurs malvoyants, dyslexiques ou présentant un trouble cognitif ont besoin d’adapter la présentation des contenus à l’écran pour faciliter la lecture (agrandir la taille des, caractères, changer de typo, de couleurs de texte, etc.).
Les documents en images rendent impossibles ces adaptations de présentation.
Pour les utilisateurs de lecteurs d’écran (personnes aveugles, très malvoyantes ou ayant des difficultés de lecture), le contenu restitué indique seulement qu’il s’agit d’une image, aucune information sur ce qu’elle contient n’est donnée.
L’utilisateur n’a donc pas accès au texte : recours à un logiciel de numérisation ou à une tierce personne pour lire le document.
Solution
- Fournir une version HTML équivalente
- Proposer un document Word correctement structuré (titres, listes…)
Pour en savoir plus : guide sur les lecteurs d’écran
Ce guide est l’une des ressources d’accompagnement du RGAA : a42.fr/lecteurs-ecran
Vers une amélioration de la situation ?
Opérations bancaires
Pour terminer ce petit tout d’horizon des exemples, voici un témoignage vécu. J’ai enfin pris la décision de changer de banque pour cause d’inaccessibilité de mon ancienne banque.
On n’a souvent pas le choix lorsqu’on navigue autrement sur le web pour cause de handicap. Je suis une casse-cou, donc j’arrive à me débrouiller. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Les gens choisissent un site parce qu’ils y accèdent et non parce qu’ils le préfèrent à un autre.
Alors que vous pouvez aller dans n’importe quelle banque en ligne, j’ai dû faire une étude de l’accessibilité des différents services bancaires.
Ancienne banque
Il était nécessaire de s’identifier à l’aide d’un clavier virtuel. Un clavier sonore alternatif était proposé. Mais il devenait obsolète, car incompatible avec Firefox et seulement avec le lecteur QuickTime.
La saisie était très lente, il fallait mémoriser des séries de chiffres.
Les relevés de compte étaient des PDFs images ou des fichier PDF protégés en lecture par le lecteur d’écran, donc difficiles d’accès.
Les opérations se validaient en double : sur le web et sur le téléphone portable en saisissant à nouveau son code à l’aide du clavier virtuel. Parfois, le temps alloué n’était pas assez long et il fallait tout recommencer.
J’ai eu beau contacter les personnes concernées par Twitter ou courriels, on ne me répondait pas ou que les remarques seraient transmises. Mais rien ne bougeait.
Nouvelle banque
Je me suis renseignée auprès de plusieurs banques et j’en ai choisi une sans clavier virtuel. Connaissant des personnes formées qui travaillaient sur l’accessibilité de ce groupe, j’ai demandé s’ils avaient l’intention d’introduire cette méthode de connexion.
Je peux maintenant accéder à mes relevés de compte en toute autonomie : les PDFs sont accessibles et les tableaux des opérations compréhensibles.
Il existe bien pour valider certaines opérations, des, cartes de clés personnelles au format papier, mais les utilisateurs qui ne peuvent pas lire ces, cartes peuvent recevoir une version électronique accessible au format Excel.
Nous avons fait face à un problème d’accessibilité lié à la sécurité. Le code à saisir était dans un format image sans alternative textuelle.
Après des échanges avec les personnes en charge de l’accessibilité, j’ai pu, en donnant mon identifiant, être mise sur une liste blanche et avoir à nouveau l’alternative à l’image.
Les personnes référentes en accessibilité sont disponibles et répondent rapidement aux doléances.
Néanmoins, les applications évoluant toujours rapidement, j’hésite à mettre à jour vers la nouvelle version, craignant que l’accessibilité soit oubliée.
En résumé
Une personne handicapée ne peut pas faire le libre choix d’un site. Elle est dépendante de son accessibilité.
- Prendre en compte l’accessibilité dès le début du projet.
- Se former aux règles d’accessibilité : il y en a pour tous les métiers !
- Avoir en interne une personne référente en accessibilité numérique.
- C’est elle qui trouvera la solution satisfaisante pour tout le monde : décideurs, développeurs, designers et utilisateurs.
- Prendre en compte les besoins des utilisateurs, mais les traiter avec discernement. Certains ne savent pas comment fonctionne leur technologie d’assistance.
- Éviter de se mettre à la place des utilisateurs en simulant leur handicap avec des lunettes, des gants ou autres outils.
Merci pour votre attention ! Des questions ? Sinon retrouvons-nous pour des échanges plus informels !